Zachée et le jeune homme riche étaient tous deux des juifs. L'un était possiblement pharisien et l'autre était un publicain, et non le moindre, le chef des publicains (Voir Luc 18:18-30 et Luc 19:1-10). Les deux personnages étaient tous deux très riches et ils ont rencontré personnellement notre Seigneur Jésus-Christ. Le but de cette courte étude est de faire ressortir les caractéristiques de chacun de ces personnages pour comprendre leurs réactions et le comportement de Jésus à leur égard.
Avant sa rencontre avec le Seigneur, Zachée était un chef des publicains de Jéricho. Pour être en mesure d'occuper cette position, il fallait posséder déjà une grande fortune. En effet, ce dernier devait d'avance acheter aux Romains ou au roi qui les représentait son droit d'opération. En réalité, celui qui briguait le privilège d'être nommé le chef des percepteurs d'impôts devait garantir aux Romains ou au roi une somme précise qu'il s'engageait à verser au trésor publique suite à la perception des impôts et des droits de passage auprès des contribuables et des marchands. La plupart du temps, pour se payer et se protéger eux-mêmes, les publicains exigeaient des contribuables des sommes supérieures à celles qu'ils auraient dû verser au trésor publique (Luc 3:12-13). Les Romains et le roi étaient conscients de cette situation, mais ils ne faisaient rien pour la corriger. Le publicain d'origine juive était habituellement rejeté par ses compatriotes parce qu'il était un collaborateur des Romains et qu'il levait des impôts pour un gouvernement païen.
Il est facile de prouver que Zachée était un juif. Premièrement, son nom semble être le diminutif du nom Zacharie, typiquement juif. Deuxièmement, il était au courant de la loi de restitution puisqu'il a offert de réparer au quadruple le tord qu'il aurait fait à quelqu'un par le vol (Luc 19:8; Exode 22:1; 2 Samuel 12:1-6). Zachée aurait donc été élevé dans les préceptes et les ordonnances de la loi juive.
Jésus, qui savait tout ce qui allait arriver d'avance, pensait sûrement à Zachée quand il décrivit le publicain de la parabole du publicain et du pharisien dans le passage de Luc 18:9-14. La conscience de Zachée n'était sûrement pas complètement endormie pour qu'il se soit intéressé à Jésus jusqu'au point de courir et de grimper dans un sycomore afin d'avoir l'occasion de le voir de plus près. Des publicains subalternes lui avaient sûrement raconté la conversion de Lévi (Matthieu), un publicain comme lui, mais qui vivait en Galilée et qui était devenu un des Douze (Luc 5:27-32). Ce fait, plus que d'autres exploits et miracles accomplis par Notre Seigneur, a dû le rendre perplexe et remettre en question sa propre situation. Il a dû aussi entendre parler, au cours de ses relations avec d'autres publicains, comment Jésus ne condamnait pas et ne rejetait pas les gens de son "espèce", mais qu'il les aimait et qu'il osait même partager ses repas avec eux (Luc 5:30-32). Oserions-nous partager nos repas avec un huissier, une personne sans compassion, qui viendrait nous arracher tous nos biens ou ceux d'un être cher? Quel grand Dieu nous avons!
Fait intéressant, Dieu a rendu à Zachée une grande faveur en lui accordant une petite taille (corporelle) (Luc 19:3). En effet, si Zachée avait été grand ou d'une grandeur normale, il ne se serait pas donné autant de mal pour apercevoir Jésus. Au lieu de monter dans un arbre, il l'aurait tout simplement regardé défiler devant lui sans se mêler à la foule qui suivait le Maître. Il n'aurait pas eu l'occasion de voir Jésus de proche et aurait peut-être perdu intérêt dans celui qui pouvait le sauver. Mais Jésus n'éteint pas "le lumignon qui fume" (Matt. 12:20). Il y avait en Zachée un embryon de repentance et Jésus le savait (Luc 5:32). Le médecin Jésus avait fixé un rendez-vous avec son patient Zachée bien avant que ce dernier soit né.
Avant d'avancer plus loin dans cette analyse de la situation de Zachée, il devient opportun, maintenant, de se pencher, de la même façon, sur le personnage du jeune homme riche (Matt. 19:16-30; Mc. 10:17-31 et Lc. 18:18-43).
Ce dernier avait trois qualificatifs importants: Il était jeune, riche et avait une fonction de dirigeant politique ou religieux. Il était fort probablement Pharisien puisqu'il observait, selon ses propres dires, la Loi à la lettre depuis sa tendre enfance. Un Hérodien n'aurait pas eu cette prétention et un Sadducéen n'aurait pas demandé à Jésus qu'est-ce qu'il faut faire pour hériter de la vie éternelle puisque les adeptes de cette secte ne croyaient pas à la résurrection. Il était vraisemblablement trop jeune pour être un chef religieux (les Lévites entraient en fonction à trente ans) (Nb 4:3). Il était possiblement un jeune magistrat, ce qui semble, même là, exceptionnel pour l'époque. Ce jeune homme avait donc toutes les conditions et les qualités pour vivre une vie fort intéressante.
Tout comme Zachée, ce jeune homme accourut vers Jésus. Il paraissait avoir de bonnes dispositions envers le Maître en le qualifiant de "bon". Son empressement à accourir devant Jésus pourrait démontrer une certaine humilité que Zachée possiblement dissimulé derrière des feuilles n'a pas démontrée en se penchant sur une branche de sycomore. Il fallait que le jeune homme , en qualité de magistrat, renonce à sa fierté de dignitaire pour se jeter comme cela à genoux devant Jésus (Mc 10:17).
Par contre, on pourrait aussi interpréter ce geste d'une toute autre façon si l'on considère que peut-être le jeune homme voulait plutôt montrer orgueilleusement devant Jésus et la foule une certaine humilité et piété. C'est le reproche que Jésus adresse aux Pharisiens qui priaient debout dans les synagogues et aux coins des rues pour être vus des hommes (Mt 6:5). Il devient facile, à ce moment là, d'associer le jeune homme riche au personnage du Pharisien dans la parabole du Pharisien et du Publicain. Mais "Jésus, l'ayant regardé, l'aima" (Mc 10:21). Ce passage de l'Écriture nous indique que le jeune homme avait quand même un coeur voulant. Jésus avait , bien sûr, décelé clairement l'ambivalence dans le coeur de ce jeune homme. Il y avait celui qui se croyait justifié par les œuvres, celui qui "avait du zèle pour Dieu, mais sans intelligence" (Rom 10:2)., mais il y avait également, chez ce jeune magistrat, celui qui reconnaissait peut-être inconsciemment la lacune de sa religion. "Que dois-je faire (de plus puisque j'ai observé la Loi depuis ma tendre enfance et qu'il semble qu'il manque encore quelque chose) pour hériter la vie éternelle?" (Lc 18:18). Le jeune homme comprenait sans en saisir toute la portée qu'il lui manquait quelque chose et il venait au bon "Enseignant" ( Le mot Maître dans ces passages est tiré du mot grec "didaskalos" qui signifie enseignant) pour connaître la vérité. Il était attiré, comme nous tous, par le Seigneur Jésus qui ne s'est pas objecté directement à la déclaration de son interlocuteur qui prétendait être sans péchés depuis sa jeunesse (Lc 18:21). On pouvait possiblement observer parfaitement la lettre de la Loi mais non l'esprit de la Loi.
Jésus n'a pas tardé à réagir; il est allé droit au but en invitant le jeune homme à observer les deux commandements les plus importants de la Loi qui consistent à aimer Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, de toute notre force et de toutes nos pensées et d'aimer notre prochain comme nous même (Lc 10:27). Ainsi, en suggérant au jeune homme de tout vendre ce qu'il possédait, et de le donner aux pauvres, il mettait le jeune homme dans une situation où il pourrait prouver qu'il était prêt à aimer son prochain comme lui-même. En ajoutant à cette suggestion l'invitation de tout abandonner pour le suivre, il mettait le jeune magistrat à l'épreuve concernant le plus grand commandement de la Loi.
Jésus n'a pas eu besoin de mettre Zachée à l'épreuve de la même façon. Zachée était convaincu, de par sa position de Publicain, depuis longtemps qu'il était un pécheur. Il n'a pas voulu se montrer à Jésus sous son meilleur jour comme le jeune homme a voulu le faire inconsciemment. Zachée n'avait rien à prouver à Dieu. Quand on se croit un bon disciple, Jésus nous invite à le suivre. Quand on se croit perdu, Jésus veut nous visiter chez nous, dans notre plus profonde intimité (dans notre cœur) (Apoc 3:19-20). C'est semblable à un élastique qui peut s'étirer, ou au contraire, se rétracter. Un des bouts de l'élastique, c'est nous qui le tenons; l'autre extrémité, c'est Jésus qui le tient. Quand nous tentons orgueilleusement de le rejoindre, Jésus tire sur l'élastique et dit:"Suis-moi". Quand nous nous sentons perdus, Jésus relâche la tension sur l'élastique pour le laisser se rétracter, il vient vers nous et il nous dit:"Il faut que je demeure aujourd'hui dans ta maison" (Lc 19:5). Zachée a reçu l'invitation avec empressement et joie (Lc 19:6) tandis que le jeune homme riche est devenu affligé et s'en est allé tout triste (Mc 10:22). Deux invitations, deux réactions différentes. Zachée a vu en Jésus le médecin qui pouvait le guérir. Le jeune homme riche a vu en Jésus le médecin qui venait de diagnostiquer un cancer. L'un a été rempli d'espoir. L'autre a sombré dans la dépression d'une mauvaise nouvelle, lui qui se croyait en si bonne santé. Le choc était trop dur, la cure trop difficile. Cette cure comprenait l'ablation d'une idole (l'amour de l'argent et des richesses) et un long processus de récupération ou régénération sous la conduite du grand Médecin que le patient devait suivre dans un pays étranger, ce pays étant inconnu du jeune homme. Ce pays était: "Mon juste vivra par la foi; mais s'il se retire, mon âme ne prend pas plaisir en lui" (Héb 10:38). Zachée est donc sorti de sa rencontre avec Jésus complètement changé. Sa repentance s'est manifestée par une intention ferme de restituer l'argent volée et d'aider les pauvres. Sa reconnaissance et son amour pour Dieu se sont concrétisés. Le jeune homme riche, lui, est reparti sans espoir, non à cause de Jésus, mais parce qu'il avait réalisé qu'il ne pouvait servir deux maîtres:
"Nul serviteur ne peut servir deux maîtres. Car, ou il haïra l'un et aimera l'autre; ou il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez servir Dieu et Mamon" (Lc 16:13).
En tant que chrétiens, nous devrions, d'autant plus, tous les jours, recevoir avec humilité et empressement Jésus dans notre cœur. Il est notre source de joie comme il l'a été pour Zachée. Il nous donnera aussi le vouloir et le faire (Phil 12:13) pour être en mesure de le suivre (Mc 8:34).
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